article: Notre soirée débat sur « Quel avenir pour la Région Bruxelloise? » avec Maurice Seewald.

Pour cette troisième soirée consacrée à la région bruxelloise, Démocratie Schaerbeekoise avait invité Maurice Seewald (de BruXselforum) à dégager avec nous des pistes pour l’avenir.

Et d’abord cette constatation apparue depuis deux ans, l’émergence d’une « communauté des Bruxellois » favorisée par l’action de divers groupes soucieux de rendre les bruxellois réellement participants à l’élaboration de leur propre destin au lieu de n’en être que les spectateurs impuissants. Parmi ces associations, il faut en citer trois :
– Manifesto (voir manifestobru.be), plutôt un bureau d’étude qui a notamment organisé une grande enquête destinée à révéler les positions des différents partis démocratiques sur l’avenir de Bruxelles
– Aula-Magna (voir aula-magna.eu) dont la base importante (plus ou moins 3000 personnes) constitue à la fois une richesse incontestable mais aussi parfois un frein à l’action militante
– BruXselforum (voir bruxsel.org) = une dizaine de militants soucieux de diffuser une information conscientisante tant au niveau de la population qu’à celui des politiques.

A l’origine de cette prise de conscience, il faut citer le manifeste « nous existons … » signé par 10.000 bruxellois (novembre 2006), mouvement auquel s’est rallié en mars 2008 des associations issues du monde économique, syndical et culturel, tant flamand que francophone et enfin l’organisation des Etats Généraux de Bruxelles (voir etatsgenerauxdebruxelles.be) avec l’adhésion importante des institutions universitaires bruxelloises (avril 2009).
L’objectif de cette dernière initiative était d’ouvrir et de partager des constats relatifs aux divers aspects de la vie bruxelloise, de pointer les chantiers prioritaires, non pour se substituer aux nécessaires arbitrages politiques, mais pour les insérer dans une vision cohérente de la ville-région bruxelloise (consulter à cet égard les 16 fiches thématiques ainsi que la réaction des politiques sur le site précité).
Il en est résulté la mise en évidence de cinq chantiers transversaux rendus d’autant plus urgents que l’on prévoit encore une augmentation significative de la population bruxelloise dans les années à venir :
– comment passer du « cityboom » à la mise en place d’une ville durable ?
– comment réduire la fraction sociale en y assurant une solidarité effective ?
– devenir la vraie capitale de l’Europe, ce qui est bien davantage qu’être le siège des institutions européennes
– pour une nouvelle gouvernance efficace, ce qui implique notamment la représentation de tous les bruxellois (seuls les belges ont le droit de vote aux élections régionales) et une lutte contre l’éparpillement des compétences (revoir le rôle des communes)
– miser sur les jeunes qui sont une magnifique ressource au lieu d’en faire un problème, notamment en assurant une gestion globale et responsable de l’enseignement.
Pour ce faire, il est souhaité d’avoir un personnel politique attaché à plein temps à ce projet (problème du cumul des mandats), à soutenir peut-être par d’authentiques partis bruxellois bilingues (pour échapper si faire se peut aux pressions des partis organisés sur base communautaire).

Quant à l’avenir de Bruxelles qui sera nécessairement abordé dans le cadre d’une réforme de l’état, Maurice Seewald propose au débat diverses options possibles :
– la cogestion de Bruxelles par les régions flamande et wallonne
– un état flamand indépendant incluant la ville de Bruxelles (avec facilités ?)
– un état indépendant wallon incluant la ville de Bruxelles (et rattaché à la France ?)
– trois ou quatre (avec les germanophones) régions fortes (qui détermineraient elles-mêmes ce qui serait à confier à un état central)
– un Bruxelles DC (à l’image de Washington aux USA)
– un Bruxelles ville-état
auxquelles quelqu’un ajouta :
– une extension de la région bruxelloise aux limites de l’ancienne province de Brabant.

Le débat avec l’assistance, malheureusement fort réduite en dépit de l’importance des questions abordées, a concerné divers sujets :

– comment assurer davantage d’emplois pour les bruxellois ? La question est complexe : il a parfois d’authentiques discriminations ou une culture d’entreprise favorisant des non bruxellois (VW Forest), mais aussi une qualification insuffisante, un manque de bilinguisme ou encore une éducation déficiente eu égard aux exigences d’un emploi régulier. Peut-être faudrait-il encourager fiscalement une économie sociale ouverte aux plus défavorisés …

– comment enrayer les tendances centrifuges axées sur le communautaire ? Le grand responsable de cette tendance est l’appartenance des politiques à des partis communautaires qui sont en mesure d’offrir à leurs membres beaucoup plus d’opportunités de carrière. De plus, il existe un verrou institutionnel qui interdit à la région bruxelloise l’acceptation de listes bilingues dans la mesure où l’appartenance linguistique d’un candidat est figée dès qu’il s’est présenté un jour sur une liste unilingue, ceci pour pouvoir garantir aux flamands 17 sièges au Parlement Bruxellois. Bien sûr, tout cela est négociable, mais …

– pourquoi donc des bruxellois francophones sont tellement désireux de lier leur sort à la Wallonie ? Ici aussi, la réponse est complexe d’abord parce que tous les bruxellois francophones ne se sentent pas wallons, même s’il en est qui s’estiment immigrés wallons à Bruxelles ou soucieux de s’unir à plus grand qu’eux devant la « menace flamande » d’encercler la ville pour mieux la conquérir, ceci rejoignant d’ailleurs les angoisses souvent mal comprises de part et d’autre (voir la volonté flamande de contenir la « tâche d’huile » qui finirait par « polluer » la plus grande partie du Brabant)

– cela renvoie à la meilleure stratégie pour défendre Bruxelles : soit obtenir un élargissement de ses limites en y incluant un nombre plus ou moins important de communes de la périphérie (et pas uniquement flamande), soit en exigeant dans un premier temps que la ville obtienne vraiment les moyens de se gérer elle-même, compte tenu de sa situation spécifique ?

– alors, pour qui voter aux élections régionales ? Bien sûr la plupart des politiques préfèrent surfer à court terme sur les passions communautaires, mais il importe d’examiner de plus près qui s’est exprimé sur les divers enjeux évoqués plus haut et en fonction de quelle vision, sans négliger pour autant l’opportunité d’alliances favorables à une évolution à plus long terme. Par exemple, la Wallonie a été d’un poids déterminant pour obtenir il y a vingt ans la mise en place de la région bruxelloise.