article: Notre AG sur les finances communales, 13 octobre 2011

M. Welens-Vrijdaghs, receveur communal, commence avec un petit exemple théorique pour expliquer pourquoi des finances communales ne sont jamais complètement prévisibles et pourquoi on ne peut jamais être sûr de couvrir toutes les dépenses…

Budget, comptes, dépenses et trésorerie
Une commune x prévoit pour l’année « y » un budget en équilibre: recettes 100, dépenses 100. À la fin de l’année, les comptes se présentent comme suit: les dépenses sont moins élevées que prévu (90): du personnel en congé et on a utilisé moins de sel en hiver que prévu etc. Mais les recettes n’atteignent que 80… quelques taxes n’étaient pas encore collectées, tous les logements n’étaient pas loués, la Région traîne avec le payement des subsides alloués… Un premier trou apparaît… Mais pour la trésorerie, la situation est encore plus difficile: même si les dépenses n’atteignent que 80, on n’a pas encore payé toutes les factures, de plus les recettes ne s’élèvent qu’à 70, il y a des taxes enrôlées mais en litige, des loyers pas encore payés… Il faut donc emprunter 10 pour couvrir les dépenses…

En l’année « y+1 », on est plus malin: le budget prévoit 120 de recettes pour 110 de dépenses. Les comptes montrent des dépenses de 80 pour l’année en cours, plus les 10 qu’on devait encore de l’année précédente, plus 10 pour les coûts du crédit, ce qui donne 100 au total. On pense donc avoir un boni de 20 (120-100). Mais, en trésorerie, … on compte des dépenses de 90 pour des recettes de 70… Malgré un bon résultat comptable, on a quand même encore plus de problèmes de trésorerie que l’année précédente….

Dans le passé, la trésorerie de la Commune de Schaerbeek était régulièrement en boni, ce qui permettait de préfinancer les subsides au CPAS, pour leur éviter des coûts de crédit. Aujourd’hui, le CPAS a une meilleure trésorerie que la Commune. Dexia a ouvert une ligne de crédit à la Commune pour les préfinancements nécessaires, mais les coûts sont à supporter par la Commune…

Les recettes de la Commune se composent comme suit: 5% prestations, 5% recettes des intercommunales, du Holding communal, 90% transferts des pouvoirs supérieurs.
Du côté des dépenses, 46% sont affectés au personnel, 37% à des transferts (à la zone de police, le CPAS etc.), 6% représentent les coûts de fonctionnement, 7% pour la dette et 4% pour les prélèvements/provisions.

Le budget ordinaire de la commune est d’environ 200 millions €. 95 mio. € sont des recettes « historiques » à percevoir encore, surtout des contribuables . On compte 27 mio. € de contentieux. Pour faire face à ceux-ci, on fait des provisions de 4,5 mio. €, la tutelle interdisant à la commune de faire des provisions plus importantes. Dans le secteur privé, on peut classifier des créances douteuses des autres ce qui est interdit à une commune. Cela empêche à la commune d’avoir une comptabilité plus transparente.

A partir de ce moment, interventions alternées et complémentaires du Receveur communal et de M. De Herde, l’échevin des Finances. Ainsi, ce dernier précise que la Commune a abandonné 3,7 mio. de créances. Il reste principalement trois grands litiges: la taxe sur les antennes gsm, presque jamais payée (env. 13 mio. €), la taxe sur les bureaux que RTBF et VRT refusent de payer alors que RTL la paye, et une partie de la créance sur Belgacom.

Pour la seule année de 2009 il s’agit de 1,9 mio. € pour les antennes et de 5,5 mio. € pour les bureaux.

Un créancier qui paye toujours avec du retard est la Communauté Française: aussi, c’est à la Commune de financer les crédits nécessaires pour payer les enseignants. En général, la commune de Schaerbeek alloue 20% de ses dépenses à l’enseignement comparés à 15% dans la moyenne des communes bruxelloises.

Schaerbeek est la deuxième commune la plus jeune de la Belgique, après St.Josse, 27% de la population a moins de 25 ans (moyenne bruxelloise: 24%), une croissance naturelle de 5,7% (moyenne bruxelloise de 2,8%), 25,4% de la population sont chômeurs (moyenne bruxelloise 20%), 3% de la population dépend du CPAS.

Schaerbeek paye ses propres pensions, contrairement à la plupart des communes belges, qui cotisent à l’ONSS-APL.

Dotations et dépenses
La Commune reçoit chaque année environ 42 mio. € de dotation générale, ce qui représente 21% des recettes, (contre 19% dans la moyenne bruxelloise et 38% à la ville d’Anvers…). Le calcul des dotations générales reflète le poids politique des communes dans la politique régionale. Si Schaerbeek pouvait recevoir une dotation comparable à celle de St.Josse, elle aurait 8 mio. € de plus par an…

Côté dépenses, Schaerbeek alloue 14% de ses dépenses à la zone de police, contre 12% dans la moyenne bruxelloise et 9% dans la moyenne des grandes villes belges.

CPAS
18% des dépenses communales vont au CPAS, qui a un budget annuel (indépendant du budget communal) d’environ 100 mio. € dont 65% sont couverts par le Fédéral. Avec 100 mio. € budget du CPAS contre 200 mio. € budget de la commune on a affaire au record belge. Aucun autre CPAS belge arrive à un budget qui atteint 50% du budget de la commune concernée. En dix ans le nombre de gens dépendant du CPAS a augmenté de 100% à Schaerbeek, tandis qu’il a diminué de 30% à Anvers. La dotation de la commune au CPAS est passée de 25,7 mio. € en 2005 à 32 mio. € en 2010. Une des raisons est la proximité de l’Office des Etrangers. ( La commune accueille beaucoup plus des réfugiés que la moyenne des autres communes.)

Dexia
La chute de Dexia n’a pas des conséquences très graves pour les affaires courantes de la Commune, les derniers dividendes datent de 2008! En 2009, la Commune a participé à l’augmentation de capital pour 9,2 millions (2 mio. € sur fonds propres et de 7,2 mio. € empruntés). La Commune les récupérera-t-elle un jour d’autant que Schaerbeek est le troisième plus grand actionnaire du Holding Communal ? Selon De Herde, la perte ne serait pas insurmontable, compte tenu de l’importance du budget total.

Conclusions
M. Welens-Vrijdaghs conclut en se demandant de quelle marge de manoeuvre dispose la Commune.
Du côté des recettes : augmenter les loyers? Augmenter les taxes mais jusqu’à quel seuil? On pourrait peut-être obtenir plus de subsides en étant plus pro-actif. Les contrats de quartier ont apporté des fonds mais quelles perspectives à long terme ? Pas grand-chose à espérer du côté des recettes de dettes (dividendes).
Du côté des dépenses, il faudrait les restreindre. Si on diminue les dépenses de personnel, cela risque d’entraver le bon fonctionnement des services. Les dépenses de fonctionnement représentent actuellement 6%. Est-ce possible de les réduire encore? Enfin, en ce qui concerne les dépenses de transferts, 90% vont à la zone de Police et au CPAS et 10% aux clubs sportifs et aux jeunes. Difficile de réduire ces postes.

Les marges de manoeuvre semblent donc très faibles.
A nous, citoyens schaerbeekois, d’être vigilants au moment de la campagne électorale, d’analyser de près les programmes des différents partis, de voir leurs priorités respectives eu égard aux moyens qu’ils comptent dégager.

Malte Woydt et Anne Deroitte