On aborde les points inscrits à la demande de conseillers communaux. Et, en premier lieu, l’incendie survenu rue Fernand Séverin. Une mère de famille est décédée, deux enfants sont toujours hospitalisés au service des grands brûlés. M. BERNARD, M. KOYUNCU (PS) et Mme LORENZINO (LB) présentent leurs condoléances à la famille endeuillée, leurs pensées aux blessés et aux autres victimes, et ils saluent l’efficacité des services de secours et l’élan de solidarité. Mais ils ont surtout beaucoup de questions.
- L’enquête est en cours, mais on parle d’un incendie « accidentel d’origine technique ». L’immeuble répondait-il ou pas aux normes du Code du logement ? Aux normes de sécurité élémentaires ?
- L’installation électrique était-elle aux normes ? Y avait-il des détecteurs de fumée ? De CO ? Fonctionnaient-ils ? Pourquoi est-il si difficile d’obtenir les documents qui attestent que tout était conforme ? Des représentants du Conseil consultatif des locataires (COCOLO) ont introduit des demandes, M. BERNARD aussi, et ils n’ont rien reçu !
- Ils voudraient des informations sur l’état de vétusté de l’immeuble, son niveau de confort, les équipements dont il disposait.
- Un chauffage d’appoint serait la raison. Certains locataires rajoutent un poêle au pétrole. Le chauffage était-il suffisamment puissant pour chauffer le logement ? Pourquoi n’y a-t-il pas de chauffage central dans ces logements ?
- Il semble qu’il y avait eu, au rez-de-chaussée il y a quelques années, un court-circuit et un début d’incendie : est-ce confirmé ? Quelle suite y avait été donnée ?
- Quel relogement, quel accompagnement social pour ces familles en grande précarité et qui ont tout perdu ? Sont-elles aidées par le CPAS ? Une aide psychologique est-elle prévue ?
- Ils sont choqués par les témoignages qu’ils ont reçus depuis le drame, sur la situation désastreuse de beaucoup de logements du FOYER : les habitants se plaignent de logements insalubres, voire dangereux. Il faut les entendre. Le Bourgmestre a-t-il connaissance de ces plaintes ? Quelles mesures ont été prises ?
- En 2015, 799 logements nécessitaient des composantes essentielles ou des réparations urgentes. Il y a certes un plan sur 10 ans mais, vu les problèmes signalés, ne faudrait-il pas accélérer ? Identifier les urgences et les bâtiments dangereux, et entamer les travaux plus tôt ?
Toute la clarté doit être faite ! Il y a un devoir de transparence, et il faut rassurer les voisins, les occupants des autres immeubles du FOYER. Ils ne veulent pas de polémique, mais des réponses concrètes, pour éviter que ça se reproduise.
La salle applaudit.
Les autres élus partagent solidarité et condoléance. Mme DURANT reconnaît que les questions sont légitimes même si elles sont difficiles à vivre pour les élus … Elle rappelle qu’on travaille depuis des années : c’est parce qu’on rénove qu’on construit moins. Mais il faudra changer et accélérer le plan, quand l’enquête sera terminée. Et il faudra informer.
Devant moi, M. DEMIRI (LB) et sa voisine sont très concentrés sur … le sujet ? Non, sur leurs smartphones !!
De son confortable siège dans l’opposition (aujourd’hui!), M. VERZIN se souvient : c’était avant les années 2000, un habitant de la rue Séverin lui avait raconté les trous dans le sol et les rats qui rentraient dans les appartements. « On ne peut plus vivre aujourd’hui avec des toilettes dans le couloir de l’immeuble et la douche dans la cuisine ? Pourtant, c’est comme ça rue Séverin ! » Il a des doutes sur la conformité, et il veut des réponses. Il évoque un problème récent, dans l’ensemble d’immeubles, avec une lessiveuse. Il engage à sortir de la rénovation appartement par appartement, même si ce sera difficile. Et, pour rassurer les autres habitants, il propose une inspection généralisée des systèmes électriques.
Aux membres du Collège de faire face aux questions et à la salle : pour M. CLERFAYT, personne ne reste insensible devant le drame du décès d’une mère de famille. Il souligne le bon fonctionnement des services d’urgence et de l’encadrement social. Il n’y pas de raison de cacher quoi que ce soit mais il attend les conclusions du Parquet et ne compte pas donner d’informations à la place du FOYER. Il croit bon de préciser que le FOYER est une société anonyme : la Commune y envoie des élus, mais elle n’en a pas la tutelle. Si les logements sont anciens et insuffisamment confortables (on rit jaune dans la salle), la Région ne les a pas décrétés insalubres. Il rappelle qu’entre 1980 et 2000, il y avait eu un gel absolu des investissements sur tout le territoire de la Commune ; depuis 2000, le FOYER met les bouchées doubles, présente des demandes de subsides et rénove depuis trois législatures en fonction des urgences et des moyens disponibles ; mais des centaines de logements sont concernés et les immeubles ne répondent pas encore tous aux exigences. Au final, le Bourgmestre évoque la possibilité que les familles puissent rentrer dans l’immeuble : ça grogne derrière moi dans le public : « Pour proposer cela, il n’est pas allé sur place !! »
Pour l’Echevin GRIMBERGHS, l’heure est au recueillement, mais il attire quand même l’attention sur l’existence d’un plan, qui a déjà été mis en débat au sein du Conseil et qui avait même fait l’objet de critiques parce qu’on ne lançait pas de nouveaux projets : en effet, la priorité a toujours été donnée à la rénovation. Ils sont conscients de la situation rue Séverin, ils se battent pour aller chercher des subsides et font des efforts au niveau du budget communal pour accélérer. Par ailleurs, le FOYER s’efforce de ne pas laisser vides certains logements : ça a des conséquences pour les locataires qui vivent dans du vétuste, mais c’est un choix que d’autres communes ne font pas, en laissant des logements vides pendant les démarches.
Argument douteux : « Vous ne mourrez pas de froid dans la rue, mais ne comptez pas sur un logement sûrement chauffé ! » Réponses et justifications politiques, gestionnaires même, alors que l’heure est au deuil, à la colère, à l’inquiétude. Difficilement supportables. Et le pire est à venir.
Le Président du FOYER, M. SAG, commence la lecture d’une longue réponse écrite : les interpellations sont légitimes ; ils suivent l’état des enfants hospitalisés et ont reçu le papa ; la famille « vit des moments difficiles » ; il a reçu des personnes qui sont dans le public et leur a répondu ; il propose de revenir avec les priorités dans trois mois, car c’est complexe ; sur la question de la transparence et la demande de documents présentée par les riverains, il cite de longs passages d’un courrier qu’il a reçu d’une autorité bruxelloise à laquelle il a demandé quelles étaient ses obligations : il y est question de l’ordonnance n° 6, de la publicité des actes administratifs, du statut du FOYER : ce dernier a-t-il la qualité d’autorité administrative ? « Il n’est pas certain que cette ordonnance soit applicable au FOYER ; donc le FOYER n’est pas tenu de fournir les documents demandés. » Intervention consternante. M. SAG est complètement à côté de la plaque, sans le moindre sens du lieu où il se trouve et des personnes qui l’écoutent : ce manque total, d’une part, d’empathie et, d’autre part, d’intelligence des instances devant lesquelles il intervient est tout simplement insupportable, et très inquiétant sur ses capacités à piloter correctement un organisme de l’importance du FOYER SCHAERBEEKOIS !!
Il sort également le « parapluie » à propos du registre incendie : on lui a attesté que le FOYER ne doit pas le tenir pour donner en location un immeuble d’habitation ! Ce que confirmera le Bourgmestre, mais il y a la façon de le dire : un tel registre n’existe pas pour les logements privés, seulement pour les hôtels ; avant toute mise en location, on vérifie la mise en conformité des installations ; les conditions posées par les pompiers sont toujours suivies, et les compteurs de gaz sont vérifiés chaque année.
La mise en conformité globale de l’installation électrique a été effectuée en 2005, continue M. SAG, et un organisme agréé l’a fait certifier pour pouvoir ouvrir les compteurs. Mais il ne diffusera pas cette certification dans l’immédiat « pour respecter l’enquête ». Il espère que ça rassure. Pas du tout, gronde le public.
La machine à laver qui a pris feu ? « L’installation électrique n’a pas été mise en cause ! »
M. SAG signale quand même le suivi psychologique assuré par le Bureau d’Aide aux Victimes, l’aide par la cellule logement du CPAS, les solutions de relogement : kit d’urgence du FOYER, hôtels, relogement temporaire et, récemment, sept logements rénovés ont pu être proposés aux familles sinistrées.
Mais était-ce le lieu et le moment pour les assertions suivantes :
- tout le monde est censé connaître l’état des logements ;
- les normes de confort sont respectées ;
- aujourd’hui, la responsabilité du FOYER n’est pas mise en cause ;
- la prise en charge des locataires a été au-delà de ce qui est prévu par la loi ;
- une réduction de loyer de trois mois est accordée lors de chaque relogement avec un maximum de 680 € ;
- les convecteurs au gaz dans l’immeuble sont sous la responsabilité des occupants ;
- les locataires peuvent faire la demande au CPAS d’une aide pour installer des convecteurs basse énergie, mais il y a un plafond ;
- la SLRB a donné un supplément de subside, pour lequel il remercie la Ministre du Logement et Monsieur l’Echevin du Logement !!! Et de lister des travaux, des coûts, des financements, un calendrier.
La jeunesse et l’inexpérience ne peuvent pas tout excuser. Il était choquant aussi de sentir M. SAG plus chaleureux pour parler des services sociaux et des secours que des locataires du FOYER …
M. KOYUNCU traduit le sentiment commun : « Les locataires ne sont pas satisfaits de votre réponse ; il faut du concret, pas des chiffres et des courriers. M. SAG doit faire un pas en avant, rendre hommage aux victimes, et constituer une commission réunie avec des agents, des élus, des locataires. »
M. BERNARD réitère sa demande d’accès aux documents. Il relève que le plan de rénovation pour les immeubles de la rue Séverin ne concerne que la toiture et les châssis : il demande que des axes sécurité et salubrité y soient intégrés. Il souligne également les retards pris par rapport au programme.
La Présidente du CPAS prend la parole pour assurer que le FOYER est dynamique, et que le confort des locataires les motive : « Il faut le savoir, malgré ce drame. »
Et M. SAG, qui a enfin déposé sa note, retrouve un peu de spontanéité bienvenue : le plan ne parle pas des rénovations intérieures mais on les fait au fur et à mesure que les logements se libèrent ; chaque parti a des délégués au conseil d’administration du FOYER, ils peuvent venir consulter les attestations de conformité ; rassurer est en cours, et on va aller sur place expliquer le plan.
Sa collègue de majorité, Mme LORENZINO, le remercie pour ses réponses complètes, et pour l’investissement et le travail au quotidien. Effectivement, en un jour comme celui-ci, qui pourrait vouloir de ce job …?